Deux ans après les législatives, et seulement quelque cinq mois après la présidentielle, les Sénégalais ont, à nouveau, rendez-vous avec les urnes, le 17 novembre, pour des législatives anticipées. Ainsi en a décidé, ce jeudi, à travers un discours à la nation, le président Bassirou Diomaye Faye (BDF), qui vient de dissoudre l’Assemblée nationale, non pas à la suite d’un coup d’Etat, mais en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 87 de la constitution. Une décision qui n’a pas été la plus difficile à prendre pour BDF, au cours de son séjour vieux seulement de cinq mois au palais présidentiel.
Confronté à une Assemblée nationale dont les élus, majoritairement de l’opposition, semblent déterminés à pourrir son mandat, le chef de l’Etat n’avait d’autre option que de rebattre les cartes politiques. Et ce qui devait arriver arriva, quand les locataires de l’hémicycle ont voté contre le projet de révision de la constitution émanant du gouvernement et qui avait pour but, la suppression du Haut conseil des collectivités territoriales et du Conseil économique, social et environnemental, deux institutions qui étaient dirigées par des proches de l’ancien président Macky Sall, et que les autorités actuelles trouvent budgétivores. Mieux, la dissolution de ces deux conseils était une promesse de campagne de BDF, lancé dans sa « transformation systémique ».
7 minutes chrono. C’est le temps qu’il a fallu à Bassirou Diomaye Faye, pour renvoyer, à leurs occupations d’avant, les députés, qu’il a accusés de briller par le « culte du blocage » et de « ramer à contre-courant » des aspirations du peuple. Sonnant ainsi fin de la récréation, BDF n’a fait que chercher à se donner les moyens de mener, sans crainte de « blocage », son programme de gouvernance. L’avenir politique du Sénégal, se joue désormais, avec pour première étape, la reconfiguration de l’Assemblée nationale, dont le parti présidentiel des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), compte prendre les commandes.
Le challenge sera-t-il aisé à relever pour BDF et le Pastef ? A priori, oui, parce que les Sénégalais ont, pour habitude, de donner au président qu’ils ont choisi, la majorité parlementaire lui permettra à celui-ci, de gouverner sans « blocage ». Pour maintenir cette coutume, le Pastef doit, au plus vite, raviver la flamme populaire qui a permis à son champion, de récolter, dès le premier tour de l’élection du 24 mars 2024, plus de 54% des suffrages exprimés, mettant KO ses adversaires, dont le candidat de la coalition au pouvoir à l’époque.
Sauf que la politique, et surtout les élections, ont cela de particulier qu’elles aiment réserver des surprises aux acteurs. Même les sondages et les bookmakers les plus pertinents, sont parfois passés à côté, dans leurs pronostics. De plus, le Pastef qui parait très confiant ne doit pas occulter que sa victoire à la présidentielle, elle la doit, en partie, aux errements de l’ancien président Macky Sall qui a monté, en vain, tous les stratagèmes possibles pour ne plus lâcher le pouvoir, alors qu’il avait promis de quitter les affaires. Cette fois-ci, le Pastef ne bénéficiera pas de ce coup de pouce bien involontaire du désormais ex-président du Sénégal.
En tout cas, pour conquérir la majorité absolue qu’ils visent à l’Assemblée nationale, BDF et les siens, une équipe qui aura certainement pour capitaine, le Premier ministre Ousmane Sonko, véritable patron du Pastef, auront moins de trois mois, pour rameuter l’électorat à leur cause. Comme le dit l’adage, « qui ne risque rien n’a rien ». L’opposition elle, a déjà joué et perdu dans ce premier bras-de-fer avec le nouveau pouvoir et en tirera, sans doute, toutes les conséquences pour organiser sa survie. Et pourquoi pas, se remobiliser, au plus vite, pour les prochaines législatives anticipées
Un tournant décisif de sa vie politique vient donc d’être amorcé par le Sénégal qui brille encore plus, de toute sa lumière de phare de la démocratie en Afrique ! Et rendez-vous dans trois mois pour voir si Bassirou Diomaye Faye gagnera son pari ! Le match entre le pouvoir sénégalais et son opposition, ne fait que commencer !
Par Wakat Séra (Burkina Faso)
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