Madagascar : c’est qui le président svp ?

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Le Colonel Michael Randrianirina

Andry Rajoelina, suite à 17 jours de contestation menée semelles battantes par le collectif Gen Z, a été exfiltré, lui et sa famille, le dimanche 12 octobre, de Madagascar dans un avion militaire français. Il a quitté le pays, mais n’a pas démissionné de son poste.

Dans un vote écrasant de 130 voix pour 160 députés, l’Assemblée nationale, que celui qui affirme être toujours le président de la république a dissoute ce mardi 14 octobre, depuis son exil, lui retourne la monnaie de sa pièce, en prononçant la destitution du président qui gouverne par décret, sur Facebook.

Dans la foulée, la Haute cour constitutionnelle constate la vacance du pouvoir. L’unité militaire du Capsat qui s’est rangé aux côtés des manifestants prend, sans surprise, le pouvoir. L’armée siffle donc la fin de la récréation, comme lors des précédentes crises que Madagascar a connues dans son histoire politique. Et le peuple est content !

Question : qui est le véritable président de Madagascar actuellement ? Le fauteuil dont Andry Rajoelina prétend encore être le détenteur lui a été ravi par les militaires qui ne reconnaissent pas, pour autant, avoir opéré un coup de force. On est presqu’en droit de leur donner raison, puisque c’est la Gen Z qui a mâché le travail terminé par le Capsat. De plus, le président de la république répondant aux abonnés absents, ce fut avec un plaisir ostensible que l’Assemblée nationale et la Haute cour constitutionnelle ont entériné la prise du pouvoir par les militaires qui, du reste, ont été applaudis par les populations.

A moins d’un dernier rebondissement dont la situation socio-politique de Madagascar est bien riche actuellement, le colonel Michael Randrianirina du Capsat est bien le nouveau patron de Tana, adoubé par la Haute cour constitutionnelle. Preuve que le président en exil qui continue de dénoncer une tentative de coup d’Etat contre son pouvoir a réussi à faire l’unanimité contre lui et est devenu, aujourd’hui, un roi nu, sur un trône invisible que lui seul voit.

Questions : Madagascar se décrétera-t-il une phase de transition, vu que ses nouveaux maîtres, même s’ils nient avoir fait un coup d’Etat, ne sont pas issus des urnes ? Les militaires confieront-ils le pouvoir à un civil, comme ils l’avaient fait en son temps pour Andry Rajoelina, avant l’organisation d’une élection présidentielle ? Quelle sera la durée de l’entente entre les députés de l’Assemblée nationale et les « grands juges » de la Haute cour constitutionnelle ?  La Gen Z, l’euphorie du moment évaporée, ne criera-t-elle pas, à la longue, à la confiscation de sa révolution qui a commencé par une dénonciation de la corruption et des coupures trop récurrentes d’eau et d’électricité, pour finir par la demande de démission d’Andry Rajoelina ? A moins qu’elle ne soit la main invisible derrière la jeunesse frondeuse, quelle sera la réaction de la classe politique malgache dans ce match qui s’est joué officiellement sans elle, et à une vitesse grand V ?

En tout cas, la Grande Île restera, visiblement, exposée à d’autres vents à la Gen Z, tant que les régimes démocratiquement élus, se serviront des urnes comme sauf-conduit pour affamer et terroriser leur peuple, poussant les militaires à sortir leur casquette de « sauveurs ».

Par Wakat Séra (Burkina Faso)

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